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Variations de regard
28 octobre 2014

Lizzie Woodruff

Dans le dernier roman de Jennifer Weiner, publié en livre de Poche, "Parlez-moi d'amour", mon personnage préféré est incontestablement Lizzie Woodruff.

Richard Woodruff est sénateur de l'Etat de New-York, et sa femme, Sylvie Serfer (diplômée et sur-diplômée de Barnard et de Yale) ne s'occupe que de lui et de sa carrière. Jusqu'au moment où à 56 ans, elle apprend que son mari l'a trompée avec une assistante. Choc, ondes de choc, conseillers en communication, ricanements des journalistes, emballement de la population, déclaration publique où elle monte au créneau (pour éviter que l'on ne demande à ses filles de le faire...) et séparation.

Après une dernière apparition publique dans un horrible parc à singes, à Boca Raton, au milieu d'Américaines bien-pensantes et curieuses de voir les réactions de la femme trompée, Sylvie se réfugie dans une maison au bord de la mer, dans le Connecticut. On devine que c'est là qu'elle va se reconstruire.

Et ses deux filles ?

Diana, l'aînée, n'a jamais été très heureuse, mais lucide et volontaire, elle a entrepris des études de médecine, est urgentiste, s'est mariée, a un petit garçon et un mari qu'elle n'aime pas. Elle est la fierté de ses parents -quand il s'agit de mettre les filles en avant pour la carrière du père. Diana ne se fait aucune illusion à leur sujet. Signe distinctif, elle court. Il n'en faut pas plus pour qu'elle se lance dans une liaison torride avec un jeune interne, en plus du sport à outrance. Relation musclée, mais sans avenir...

De Lizzie, on sait très peu. On sait qu'elle est asthmatique, qu'elle a presque si pas été abusée à douze ans, bien que par un garçon qui lui plaisait, et toxicomane (apparemment, mélange de médicaments, d'alcool et de haschisch ou Dieu sait quoi). Après un mini-scandale (elle a été reconnue comme la fille d'un homme politique par un dealer et prise en otage) elle sort de sa troisième cure de désintoxication. Elle est blonde et jolie, un peu ronde, fragile, attachante. Diana, qui la traite de façon un peu méprisante, l'a engagée comme baby sitter pour son neveu, Milo. Et Lizzie -bien que très mal payée- s'acquitte très bien de cette tâche.

Pendant ses promenades à Philadelphie, où elle alterne occupations avec son neveu, photographies dans la ville, réunions aux AA, un jour, elle se fait chahuter par des étudiants et un garde de l'Independance hall intervient. Jeff, son contraire absolu, évidemment, tombe amoureux d'elle tout en lui révélant que sa mère était alcoolique. Lizzie n'arrête pas de se dire qu'elle va tout lui dire et tout arrêter, mais n'en a pas le courage. Par petites touches, on apprend son passé, comment son père l'a conduite dans son centre de désintoxication dans le Minnesota, ses tentations pour boire un verre, ou avaler une pilule, quand sa soeur la rudoie, mais elle ne rechute pas. Et son bonheur, avec Jeff, un homme comme elle n'en a jamais connu.

Et puis, au terme d'un malentendu et d'une dispute, Diana la renvoie. Diana n'a pas  non plus envie que sa soeur découvre sa liaison Lizzie n'a qu'une solution, remonter à New York où elle retrouve son père seul, abandonné, désorienté. Elle va s'en ocuper. Avant de trouver un boulot chez un photographe (les notations sur la manière de photographier de Lizzie sont très intéressantes).

Elle ne photographie pas d'une manière plan-plan (pourrait-on dire...)

L'histoire atteint son point culminant quand Sylvie, seule dans son Connecticut, se dit qu'elle aimerait bien voir ses filles et s'occuper un peu d'elles, s'il n'est pas trop tard. Elle s'est fait un ami, Tim, un vieil ami retrouvé, qui vient manger régulièrement chez elle, en toute simplicité. Par la même occasion, elle a laissé tomber ses tailleurs qui valent une fortune, les gaines, les régimes, le "coach nazi du Pilates" et appris avec bonheur à cuisiner des gâteaux avec de la graisse Crisco (et tant pis pour sa nutritionniste!).

crisco

Au même moment, Diana, l'aînée, part bruncher avec mari et fils et tombe nez à nez avec son jeune amant.

Il la quitte. Bouleversée, elle va travailler, commet une erreur médicale, risque d'envoyer une petite fille diabétique à la mort et est mise en congé. Elle annonce à son mari qu'elle va le quitter et ne sachant que faire, après avoir retiré son fils de l'école et l'avoir emmené dans un grand hôtel new-yorkais pour une nuit, elle décide de partir à Fairview rejoindre sa mère.

(Fairview existe-t-il ? On aimerait bien, car cela a l'air d'être le rêve là-bas).

Au même moment, à New York, Lizzie, qui travaille tout en s'occupant de son père, se rend compte qu'elle est enceinte. Ce n'est que quand elle perd du sang que paniquée, elle consulte et est condamnée à l'alitement. Seule solution pour ne pas éveiller l'attention de ses parents (elle s'en méfie, ne vont-ils pas l'envoyer dans un foyer de filles mères - attention, elle a  quand même 24 ans mais on ne l'a jamais beaucoup considérée, c'était plutôt la "ratée" de la famille), rejoindre sa mère qui l'invite instamment et prétendre qu'elle s'est tordu le dos et doit rester alitée.

Aussitôt dit, aussitôt fait, mais auparavant, elle repasse par Philadelphie voir Jeff, dans l'idée de lui avouer qu'elle est une ancienne toxico, mais enceinte de lui, et qu'elle ne veut pas gâcher sa vie... Elle n'avoue qu'une moitié des choses et s'en va, les lèvres serrées sur son secret.

Si quelqu'un a envie de lire le livre après ceci, je ne vais pas raconter le dénouement.

Toutefois, il y aura de longues siestes où les soeurs récupèrent, un pique-nique sur la plage, Halloween à Fairview, un dîner de Thanksgiving, dont la description vaut le déplacement (dinde farcie, chutneys, légumes d'hiver, purées, tartes au potiron, pains divers et spécialités gastronomiques américaines...) avec Selma Serfer, une vieille dame impayable, la mère de Sylvie Woodruff, qui comprendra bien plus de choses que sa propre fille...

Forcément, en parlant de Lizzie, j'ai été obligée de raconter l'histoire. Mais j'aime Lizzie. Elle est fragile, a échappé au pire, ne connaît personne, n'a aucune amie, pas de travail, pas de diplôme, et pourtant, cet enfant qu'elle porte va la raccrocher à la vie. Jennifer Weiner, écrivaine juive américaine a abordé la maternité sous toutes ses formes, dans des livres très réussis (Alors, heureuse? Envie de fraises, et La fille de sa mère). Elle aime bien aussi les anti-héroïnes, celles qui ne se révèlent pas être des mères merveilleuses, mais ont le blues, des enfants qui pleurent tout le temps, des problèmes, des maris absents ou aimants ou au chômage, bref, comme dans la vraie vie.

Et parfois, hélas, un enfant qui meurt.

Mais, à l'encontre de la vraie vie, souvent, je dois bien reconnaître que cela finit bien.

pas par le divorce et la solitude...

Il n'empêche que j'aime Lizzie et que cela valait bien un petit compte-rendu !

flyawayhome350

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Commentaires
P
Qu'est-ce qui fait, quand on a été (entre autres) l'élève de Joyce Carol Oates, que l'on choisit d'être un auteur classifié "chick litt" ... D'où à part un certain lectorat, on n'ira pas voir, ni lire, d'où on ratera - parfois - quelque chose...
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Q
En fait, elle finit bien pour une personne o;) <br /> <br /> <br /> <br /> Pour les autres, et même pour Lizzie, c'est une question de choix... Leur choix est facilité du fait déjà qu'elles sont riches (et en bonne santé). Evidemment, on ne peut pas en dire autant de tout le monde et on s'en sort mieux quand on est médecin urgentiste que quand on est en invalidité o;)))
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W
Si une telle histoire finit bien, c'est ce qu'on appelle un roman irréaliste :-)<br /> <br /> ça me fait penser aux Gilmore girls qu'à mon grand dam, ma petite-fille regarde avec entrain !
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A
ça sent à plein nez son "American movie", cette histoire :-)<br /> <br /> tu ne dors pas, à trois heures du matin?
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P
Et Cassy - au moment de mettre des noms, ma mémoire me fuit et pffuuuit....
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Variations de regard
Variations de regard

Quartz Rose ou pas, je suis toujours Pivoine... Me revoici, avec, pour fil conducteur, des souvenirs de Bruxelles, des balades en d'autres lieux. Donc, musardons ensemble, un peu au hasard, nous verrons bien où nos pas nous mènent

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