Brèves de mon papa... (2)
Dans son ancien appartement, mon père (qui avait la main verte et aimait jardiner - quel soin il prenait de ses orchidées !) avait semé les graines d'une tomate dans un pot - qu'il avait placé sur son appuie de fenêtre, sur sa minuscule terrasse, à Woluwé. Eh bien, la ou les graines ont germé, la plante a pris, et deux années de suite, il y a eu de petites tomates (calibrées, bien sûr!) mais tout à fait mangeables, puisque j'en ai mangé une ou deux.
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Dans son appartement, il avait un jour préparé un repas complet et nous avait invités - je crois qu'il y avait mon frère, mon ami, mon fils - nous devions être six à peu près. Il avait préparé des pêches au thon en entrée - pour le plat, je ne me souviens plus - et des fraises au vin pour le dessert, une recette de sa propre mère. C'était un peu alcoolisé pour moi, les fraises étaient en somme comme "cuites" dans le vin, mais c'était surprenant.
Villeroy & Boch, service Rusticana "blue"
Sur sa porte, il avait affiché une feuille de papier A4, "Bienvenue à un dîner presque parfait". Nous avions tous ri, et nous demandions si nous allions faire la critique du repas / de la table / de l'animation dans... Les w.c. ou la salle de bains comme cela se faisait couramment.
Il ne me semble pas qu'il ait jamais fait le célèbre coq au vin de ma grand-mère (ma tante, sa soeur cadette, Raymonde, décédée il y a quelques années) "possédait" la recette - qui ne doit pas être très difficile à reconstituer, puisque j'en ai mangé plus d'une fois chez ma grand-mère (j'aimerais d'ailleurs mieux le coq (qui sera devenu du poulet, voire, des cuisses de poulet) au vin blanc plutôt qu'au vin rouge).
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Mon père - dans la caravane que nous avions louée, à Bohan, dans un terrain de camping tout à fait convenable, le long de la Semois - jouant le soir sur l'harmonica de mon frère, et interprétant "Sous les ponts de Paris"... Nous étions scotchés. J'avais douze ans. Nous étions à trois, durant la semaine, ma mère ayant commencé à travailler et n'ayant pas de jours de congé - elle nous rejoignait le week-end.
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Mon père était toujours le premier quand une tuile nous tombait sur la tête, genre, on retrouve une de mes valises, perdue au mois de juillet, dans un camp scout, un mois après, au fin fond de la Belgique. Après être rentré du bureau, il a dit: on va rechercher ta valise et nous sommes partis et revenus - avec ma valise, qui contenait mon journal intime de l'époque (1974, année clé!) .
De même, quelques années plus tard, mon frère était en vacances en Espagne quand ma mère a dû être hospitalisée pour une opération assez lourde. Mon frère a pris le train mais n'avait pas de quoi payer son voyage jusqu'à Bruxelles. Après sa journée de boulot, mon père est rentré et a dit: "bon, on va chercher ton frère à Saint-Quentin". Nous sommes partis à deux, que pouvait-il bien avoir comme voiture à l'époque ? La R5 peut-être... Vert pomme - vert gazon vif. Et nous avons ramené mon frère au petit matin. Ma mère s'en est sortie (mis à part le fameux microbe des hôpitaux) mais elle est restée fragile et extrêmement mince, pour ne pas dire maigre.
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Mon père nous emmenant, le samedi après-midi, mon frère et moi, aux bains de Saint-Josse (ce qui me fait penser que j'avais regardé les horaires pour aller au bassin de natation du "Ceria", à Anderlecht, pour faire de l'exercice, mais il pleut tellement...) bref, j'étais petite, j'avais quoi ? Entre 8 et 10 ans ? Il y avait encore des cabines individuelles, l'eau était tiède, je ne savais pas nager, mais j'aimais barboter dans l'eau chaude. Au retour, on passait au "Centra", l'épicerie du coin, et on avait acheté des sandwiches mous (des petits pains de forme allongée briochés) qu'on garnissait de tranches de fromage de Gouda, "pas trop minces, s'il vous plaît!"
Ce qui reste en moi, c'est l'odeur, le parfum très particulier, de mes cheveux encore humides d'eau chlorée, du pain tiède, et du fromage savoureux, ainsi qu'une bonne et saine fatigue.
Mon père qui montait toujours me rassurer, quand j'étais petite, et qu'on m'avait mise au lit, et que je ne dormais pas, à cause des ombres inquiétantes qui se mouvaient derrière les tentures de la chambre - des tentures en velours brun, pas très engageantes. Il me disait que non, il n'y avait pas de chien, il n'y avait pas de "bête", etc. etc.
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Mon père avec qui j'ai regardé des matches des Diables rouges, moi qui n'y connaissais rien en foot...