Brèves sur le Chemin...
Sur internet, en cherchant un peu, on trouve les différentes étapes du deuil. J'en parlais avec quelqu'un, récemment. Naturellement, nous sommes tombés d'accord pour dire qu'il ne faut pas voir cela de manière géométrique. Ce n'est pas une étape, puis une autre, puis la suivante, etc.
Jusqu'à l'acceptation finale, comment dire? Le souvenir, mais nimbé d'une sorte de paix.
Après la sidération et le déni - l'impossibilité pour l'esprit (ou l'âme ou le coeur) d'intégrer la réalité, il y a la colère. Etrange colère, sentiment inconfortable. Je connais quelqu'un qui la liquide en se battant pour des causes sociales. Moi, elle me prend parfois quand je pense à certains comportements, chez certaines personnes. Et puis, je rationalise... Je ne sais pas si je relativise, mais en tout cas, je rationalise. A force, le cerveau finira bien par l'emporter sur les tripes (si tant est que j'aie un cerveau!)
Et puis, il y a la comptabilité, suivie du marchandage... Moi, je vois le marchandage comme des pensées du style, "si j'avais su que ce serait si court, j'aurais fait ceci, je serais allée le voir plus souvent, j'aurais encore plus parlé avec lui, etc. etc."
Mais pour moi, le jour de l'annonce, le moment où l'on va voir la personne aimée, ce moment que l'on n'oublie pas jamais - mais auquel je préfère ne pas trop m'arrêter - jusqu'aux funérailles, c'est vrai qu'il y a une sidération - et un profond désespoir. En même temps, je sais que les funérailles de mon père ont eu lieu le 4 août (en réalité, j'ai dû rechercher la date, j'avais tendance à l'oublier), mais pour tout ce qui concerne le mois d'août, à part une balade le 15 août, en forêt, avec des amis, et le vendredi 19 août, je ne me souviens de rien. Absolument de rien.
Je ne sais pas ce que j'ai fait, je ne sais pas ce que j'ai lu (rien sans doute, et je n'arrive pas encore à me concentrer sur ce que je lis, par contre, je n'ai pas perdu ma capacité à écrire), je ne sais plus...
Maintenant, je commence à me dire des choses concrètes - et je pense à une volonté de mon père écrite sur une lettre déjà ancienne, "pas de deuil éternel, pas de larmes (facile à écrire, mais je comprends ce qu'il a voulu dire par là, lui)..."
J'ai nettoyé mon appartement? Dans une perspective utile mais pas facile? Je pense que mon père aurait été content. Il m'aurait dit (ou il l'aurait pensé) "c'est bien ma fille. Tu fais ce que tu dois faire. Même si c'est difficile".
J'essaie donc d'avancer un jour après l'autre... J'écris mes Cent mots de Queneau. Je retourne à l'Académie, je me balade... Je pense à mon "anniversaire" et au boudin que mes parents ont mangé le 21 septembre à midi (qu'est-ce que mon père m'en a parlé, de ce boudin !)
J'en parle peu ou beaucoup, normal, j'y pense.
Et si j'écris là-dessus aujourd'hui, c'est un peu aussi en pensant à une amitié - virtuelle - à quelqu'un qui est sur ce Chemin. Peut-être est-ce important, de savoir que l'on n'est pas seule sur un chemin, et bien sûr, une expérience n'est pas l'autre... Mais ce soir, je me dis que je dois peut-être écrire cet article pour cette amitié - sympathie - que faut-il écrire ? Virtuelle.
Et je repense aussi à ce que mon collègue (en réalité, c'était mon directeur, en 2001), psychologue, m'a répondu, après le décès de ma maman et à la question que je lui posais sur la durée du deuil... (Ma question venait aussi du fait que ma mère n'avait jamais fait le deuil de ses parents - elle était très jeune quand ils sont morts, respectivement en 1947 et en 1953).
"Je te promets qu'un jour ça ira mieux." (ou qu'un jour, tu feras ton deuil), "mais je ne sais pas te dire quand".
Et puis, des phrases comme ça, entendues chez des personnes, puis d'autres, qui font "tilt".
Une dame, il y a deux semaines, "je prends soin de mon âme"...
Et une recommandation, lundi, "soyez douce avec vous, en ce moment...
Parce que ce ne sont pas toujours les "autres" qui le seront pour vous..."