Les Choristes
Hier, j'ai regardé pour la ènième fois "Les choristes".
Je réfléchissais aux différents rôles de Gérard Jugnot... Depuis "Le Splendid" et "Les Bronzés". Puis à l'élève Mouton qui s'était suicidé, puis à "Mondain" qui, accusé d'avoir volé la caisse, avait tenté d'étrangler le directeur, puis été renvoyé entre deux policiers et qui avait, finalement, mis le feu à l'Institut.
J'ai pensé à tous ces enfants qui n'avaient pas envie d'être là. Par la suite, j'ai pensé aux élèves que j'ai eus, dans ma courte carrière de prof et je me suis demandé s'il y en avait qui avaient envie d'être là. Il y a ceux qui subissaient et se révoltaient, dont la première préoccupation était de faire la foire - ce fut notre première expérience, à une stagiaire et à moi, à l'Ecole Normale. On nous a laissées seules, avec une classe et ce fut la folie - à peu près comme à "Fond de l'étang". Nous sommes restées, stoïquement (la prof s'était tirée courageusement pour un motif seul connu du lycée), et j'ai tenté de continuer de donner cours, en pure perte.
Cela m'a donné un avant-goût de ce qui m'attendait, mais enfin, cela n'a quand même pas toujours été comme ça.
J'ai pensé aussi - non je pense tout d'un coup à des petites élèves (exceptionnellement, j'ai fait un ou deux intérims dans le primaire, pour l'enseignement duquel je n'étais pourtant pas formée), dans une école libre, à Molenbèèèk. Ou Beeek. Près de la chaussée de Gand, en janvier 1994, je pense. J'avais une petite élève de première primaire qui était douée. En dessin. Lente, minutieuse, mais exceptionnellement douée. Egalement au cours d'informatique. J'en ai même parlé à sa soeur aînée, en 6ème primaire. Les élèves de 6 à 12 ans disposaient d'Apple Mac Intosh à souris, forcément, et je lui ai patiemment expliqué le fonctionnement de l'Apple, assez semblable à celui de l'Atari (j'avais un Atari 1040 ST chez moi - ou déjà le modèle au-dessus).
Elle a très bien compris et, après 50 minutes, maniait honorablement la souris. Comme quoi.
***
Par la suite, je me suis demandé si NOUS avions envie d'être à l'école. Dans mon enfance. C'était le genre de chose en face de quoi nous n'avions pas le choix. Il fallait y aller et il fallait que cela se passe bien. Cela différait de "Fond de l'étang" dans la mesure où nous n'étions pas orphelins ou orphelines et où on était en externat. Et si cela ne se passait pas ASSEZ bien, c'était forcément de notre faute. C'est ainsi que l'on forge ou que l'on a forgé des générations de femmes culpabilisées et d'hommes qui se demandent pourquoi ils sont là. Et surtout, comment.
Il restait donc à espérer l'institutrice "miracle" qui serait "juste" et grâce à laquelle on pourrait apprendre. Oui, c'est cela. Dégagée de la peur de l'autorité, je pourrais enfin apprendre. Somme toute, c'est ce que fait Clément Mathieu dans "Les choristes". Il apparaît comme un peu laxiste, mais il met les enfants en face de leurs responsabilités. Puis en confiance. Puis il leur apprend à utiliser leurs possibilités. La mimique de "Mondain", quand il quitte le pensionnat est juste un peu difficile à interpréter, lorsqu'il "salue" son surveillant - ou lui fait un signe en tout cas. Quelque chose entre le "tu vois, j'avais raison..." (de quoi? D'être un voyou dont il n'y a rien à espérer?) et le "finalement, t'étais pas un si mauvais bougre que ça... Juste un peu mou peut-être..."
L'école, je me demande toujours ce que j'attends pour en faire un livre !