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Variations de regard
5 mars 2019

Contrairement à Pérec...

Je ne me souviens pas des jours, disons qui se sont déroulés entre le dimanche 4 mars 2001, quand je suis rentrée à la maison avec mon père, et le jeudi 8 mars, jour de l'enterrement de ma maman.

Evidemment, depuis dimanche, je pense à elle, c'est inévitable, même si elle s'éloigne dans le temps. 18 ans, c'est beaucoup. Au début que je vivais ici, je rêvais encore souvent d'elle. Maintenant, moins. Ou plus. Ou alors, je ne m'en souviens pas.

Je ne sais même plus si je suis retournée travailler le lundi, ou pas. Etrange période... Mon père et moi avons reçu l'entreprise des pompes funèbres, je suppose que je suis retournée travailler, car je n'étais pas là quand ils se sont arrangés pour les absoutes. J'ai simplement fait dire que je lirais trois textes - extraits de son carnet de pensées et de citations.

Un texte de Nietzsche, un texte très poétique tiré de l'Ecclésiastique, un texte sur la symbolique du terme Germinal.

Bien entendu, si j'avais su, le samedi, quand j'ai quitté l'hôpital, le soir, que le lendemain matin, elle ne serait plus là, j'aurais essayé d'y passer la nuit. Bien entendu, le lendemain matin, c'est mon frère qui m'a annoncé la nouvelle (ce n'était pas vraiment une surprise, je savais très bien qu'elle ne survivrait pas à la chute qu'elle avait faite deux ou trois semaines auparavant, et qui s'était soldée par une fracture du col du fémur). Mais quoi qu'il advienne, on encaisse un choc, et on se sent dans un état très bizarre. Complètement à la masse et à côté de soi. Le corps agit, continue sur sa lancée, et la tête est partie - ou est sonnée.

Mais le plus hard - c'allait être la visite chez le notaire, quelques jours après. Et les ennuis qui ont suivi. Avec mon ex-seconde-belle-soeur, acharnée au gain. Soit. Même la mort n'empêche pas la cruauté. Ce qui m'attriste le plus, c'est que malgré mes avis, ni ma mère ni mon père, (des années après), n'avaient prévu ou voulu prévoir les ennuis qui me tomberaient dessus (ainsi que sur la tête de mon fils, in fine). Réitérant ainsi les ennuis que ma mère avaient connus, quarante ou cinquante ans auparavant, à la mort de ses propres parents (et dont je n'ai pas connu pas tous les détails - certains suffisent amplement).

En somme, ni ma mère ni mon père ne m'ont écoutée. Même lorsqu'ils me demandaient mon avis. Alors, pourquoi me le demandaient-ils? Ma mère était rongée par la culpabilité - par rapport à l'aîné - du coup, je me pose la bonne question: faisait-elle une différence entre un fils et une fille? Ou un aîné et un cadet? Né, selon elle, à une meilleure période? Comme si, du coup, pour moi, tout allait couler de source. Cette question mérite d'être posée... Je dirais qu'elle n'interfère pas avec les sentiments. Elle nous aimait - tous les deux. Mais elle faisait des différences. Et puis, elle n'était pas infaillible.

Elle ne voyait que les soucis professionnels pour mon frère... Et les questions d'ordre affectif pour moi (en clair, faire ou ne pas refaire ma vie? Comment et avec qui? Alors que je sortais d'en prendre) Le problème affectif allait tout autant se poser pour mon frère... Que les problèmes professionnels pour moi. Quant à mon père, elle avait toujours prédit qu'il se dépêcherait de refaire sa vie, ce qu'il n'a pas fait. Elle s'est donc complètement plantée sur nous trois...

***

Elle est morte au mois de mars 2001 et je crois que le premier moment où je me suis sentie moins mal, c'est en été, c'est quand j'ai commencé à rédiger le dossier pédagogique sur la Citoyenneté au féminin, pour mon travail. J'ai fait ce dossier pédagogique avec intérêt et même, du plaisir. Et j'ai amorcé un changement de vie. Tout ne fut pas parfait, loin de là, mais cela a eu le mérite de me changer les idées... Je ne dis pas que je n'ai plus pensé à elle, non, disons que les choses ont un peu changé, sans que je doive faire des efforts surhumains pour sortir du marasme...

Je me souviens (tout de même) de mon retour au travail, après l'enterrement, et de mon directeur qui m'a dit:

"je te promets que tu feras ton deuil, mais je ne sais pas te dire quand."

papa maman 17 juin

Mes parents le 17 juin 1986.

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Commentaires
M
Bizarrement, j étais très en colère toutes ces années qui ont précédé la mort de ma mère. .... Je passe les détails mais le jour de l enterrement j ai tout pardonné à toute la famille constatant que j avais gâché beaucoup d énergie pour rien...... La mélancolie est toujours la .... Et je crois qu' on reste toute sa vie l enfant qu' on était.. .... il faut faire avec......
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A
Il me semble que tu as bien mis le doigt sur une erreur qui devait être fréquente dans les générations précédentes (et je l'espère plus, ou moins, actuellement?), qui était de focaliser sur la profession pour les garçons, et sur l'avenir familial pour les filles. Les deux en ont pâti. Merci pour ce beau texte sur le deuil.
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A
Ce texte me parle beaucoup, beaucoup..<br /> <br /> Comme toi je n'ai plus ni ma mère, ni mon père.. et comme toi, juste après le choc, s'est déroulé celui des... comment dire, s'apercevoir des "préférences", enfin non pas qu'on s'en aperçoit, mais ça fait ressortir de douloureux ressentis...<br /> <br /> Chez nous c'était un peu particulier car il y a mon frère, qui est un peu "attardé" (dans quelle case le mettrait on, aujourd'hui?)' et qui a toujours été le chouchou....<br /> <br /> toujours favorisé pécunièrement aussi, de ce prétexte là...encore maintenant il estime que tout lui est dû et le monde tourne autour de lui.... <br /> <br /> <br /> <br /> Toi et moi sommes de la même génération, il y a donc de fortes possibilités pour qu'un fils "compte plus" qu'une fille pour tes parents, qui étaient d'une génération où avoir un fils qui transmettrait le nom, comptait beaucoup...<br /> <br /> <br /> <br /> Ma mère, ça fait 12 ans, mon père 19, et mes parents sont toujours aussi présents. Y a -t-il une normalité en ce domaine?<br /> <br /> <br /> <br /> Affectueusement à toi, Marie
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Variations de regard
Variations de regard

Quartz Rose ou pas, je suis toujours Pivoine... Me revoici, avec, pour fil conducteur, des souvenirs de Bruxelles, des balades en d'autres lieux. Donc, musardons ensemble, un peu au hasard, nous verrons bien où nos pas nous mènent

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