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Variations de regard
2 juillet 2015

Se définir par ce que "je ne suis pas" (2)

Consigne d'écriture de Jean-Paul Gallibert dans "Interludes".
Deuxième proposition sur ce que je ne suis pas !

" Je ne suis pas Marguerite Yourcenar. Et c’est affreux ! Enfin non, si j’avais été à la place de Marguerite Yourcenar, je serais morte et enterrée. Dans l’Ile du Mont-Désert, d’accord (je crois), mais je n’aurais plus aucun espoir de pouvoir encore faire quelque chose.

Je n’ai pas rencontré de Grace Frick non plus. Ni d’Alice Toklas (là, je passe à Gertrude Stein, mais je n’ai jamais souhaité ressembler à Gertrude Stein! Sauf que je l’aime bien dans « Midnight in Paris »…)

Je ne suis pas plein de choses et je le regrette. Mais peut-être est-ce parce que j’ai trop chaud. Cela fausse la pensée. Ainsi, quand on me dit que je suis une femme intelligente, cela m’énerve. D’abord, je ne suis pas très intelligente ou disons, pas plus que la moyenne, et en plus, avec l’âge (et la chaleur), cela diminue singulièrement les capacités. Il me semble que si j’étais intelligente, j’aurais mieux gouverné ma vie. Mais peut-être qu’intelligente ou non, j’aurais pu plus mal la gouverner aussi.

Certainement même.

C’aurait pu être pire, nettement pire.

Je suis à l’âge où l’on fait des bilans. On voudrait (non, je voudrais) réécrire l’histoire et à quoi bon ? Comme je l’ai lu chez une charmante dame, « on ne photographie jamais deux fois le même fleuve » (ce n’est pas de moi).

Voyons, qu’ai-je souhaité à mon fils quand il est né ? J’essaie de me souvenir. Je souhaitais qu’il ne soit pas un littéraire. Qu’il soit beau, riche et intelligent. En clair, je trouvais qu’être mauvaise en mathématiques (voir plus bas) et bonne en littérature, en histoire et dans les cours de sciences humaines, cela m’avait été finalement nuisible, non pas nuisible, mais cela ne m’avait pas facilité la vie professionnelle. Vous vous imaginez? Etre trilingue en langues mortes, aujourd’hui ? Avoir fait du latin et du grec (et ne même plus s’en souvenir!) Alors que je vis dans un pays où il faut connaître l’anglais et le néerlandais?

Et finalement, j’ai un fils qui a tout eu: le latin et le grec, l’anglais et le néerlandais en prime. Et le français.

Sauf que, finalement, cette vie professionnelle, je l’ai terminée dans ce que je voulais faire. Donc, mon fils est finalement devenu un « littéraire » disons – pas comme moi, c’est un technicien de la langue, et moi qui ne voulais pas qu’il soit littéraire, je voudrais pourtant que la flamme, comme dire ? La flamme, le potentiel de création, éclose un jour pour lui. Je ne suis pas logique avec moi-même. Je suis sûre qu’elle est là, quelque part, cette « flamme » (ou ce potentiel), mais avec une mère qui se prenait pour une poétesse, et un père qui a fait carrière dans le dessin… La peinture, le portrait, l’infographie, il y avait de quoi être dégoûté.

Non, je ne suis pas logique avec moi-même. Je veux et ne veux pas des choses pour celui que j’aime le plus au monde, en réalité, ce que je voudrais, c’est qu’il soit heureux. Je ne suis pourtant pas superstitieuse, mais je me dis que quand il était petit, j’aurais dû dire « je voudrais qu’il soit juste heureux ».

Je voulais et ne voulais pas qu’il me ressemble. Non, ce n’est pas cela. Je voulais lui transmettre ce que j’avais reçu de meilleur, et je crois que j’ai réussi, au-delà de toute espérance – et tenant compte de la difficulté de vivre, mais je m’éloigne de la consigne d’écriture (et en plus, je suis trop longue), ou alors, pour respecter la consigne, je devrais dire, je ne sais pas si j’ai été une bonne mère.

Au vu de tout ce que je ne suis pas, peut-être ai-je tout de même une chance de devenir (même à soixante ans – bien que je ne les aie pas encore!) ce que je suis ? "

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Variations de regard

Quartz Rose ou pas, je suis toujours Pivoine... Me revoici, avec, pour fil conducteur, des souvenirs de Bruxelles, des balades en d'autres lieux. Donc, musardons ensemble, un peu au hasard, nous verrons bien où nos pas nous mènent

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