Souvenir.
Souvenir des funérailles de Winston Churchill, vues à la télévision, le samedi 30 janvier 1965.
Nous n'étions pas à la maison, nous n'avions d'ailleurs pas de télévision. Nous nous trouvions dans le magasin (la caverne d'Ali Baba) où nous faisions nos courses le samedi après-midi, une institution bruxelloise, l'Union Economique, rue du Vallon (c'était une coopérative et il fallait en être membre). On entrait par la chaussée de Louvain, à gauche, la papeterie, à droite, le rayon du tabac (où nous ne nous arrêtions jamais), puis on arrivait dans un grand hall où il y avait la vaisselle et tout pour la maison (Boch, Melitta et les vases des Cristalleries du Val St Lambert). Il y avait un petit passage à droite, et mon frère et moi montions jusqu'à la librairie où nos parents nous laissaient tout regarder à notre aise... Après, mes souvenirs se brouillent. Normal, c'était un véritable pêle-mêle architectural. Avec des ascenseurs et des préposés aux ascenseurs en cache-poussière gris.
Il me semble que les télévisions se trouvaient dans la nouvelle aile, un bâtiment moderne, qui devait donc déjà exister en 1965. Mes parents se sont arrêtés, et nous aussi, parce qu'on diffusait justement les funérailles de Winston Churchill. Je me souviens de l'expression de leurs visages. Grave. Ma mère a toujours exprimé beaucoup d'admiration pour l'attitude des Anglais, pendant le Blitz. (Mais pas exclusivement... Justement, plus tard, quand nous avons eu la télévision, nous avons été abreuvés de 40-45.)
Il n'empêche... perdide Albion! Je regrette qu'ils aient fait sécession. Je ne pense pas que j'irai encore en Angleterre, mais si l'envie me prenait de partir sur les traces de Jane Austen, de Virginia Woolf, de Carpenter et de quelques autres, à Coventry, pourquoi pas? Je devrais avoir un passeport. Et je ne connais plus beaucoup d'anglais...
Bref, tout ceci m'éloigne de Winston Churchill. Et de la fin de son fameux discours...
" (...) Nous irons jusqu'au bout, nous nous battrons en France, nous nous battrons sur les mers et les océans, nous nous battrons avec toujours plus de confiance ainsi qu’une force grandissante dans les airs, nous défendrons notre Île, peu importe ce qu'il en coûtera, nous nous battrons sur les plages, nous nous battrons sur les terrains de débarquement, nous nous battrons dans les champs et dans les rues, nous nous battrons dans les collines; nous ne nous rendrons jamais, et même si, bien que je n'y crois pas un seul instant, cette Île ou une grande partie de cette Île devait être asservie et affamée, alors notre Empire au-delà des mers, armé et gardé par la flotte britannique, continuera de lutter, jusqu'à ce que, quand Dieu le voudra, le Nouveau Monde, avec tout son pouvoir et sa puissance, viendra à la rescousse libérer l'Ancien."
Extrait du Discours livré à la Chambre des communes de Westminster
par Winston Churchill, le 4 juin 1940"
Londres, cathédrale St Paul, le 30 janvier 1965.