Deux impressions d'Orval
Je suis souvent passée à Orval, comme ça, avec mon amie D*** le plus souvent, même avec un ex-blogueur dont nous ne savons ni l'une ni l'autre ce qu'il est devenu - il a totalement disparu des écrans radard... Bref.
J'ai dû aller à Orval avec mes parents pour la première fois vers six-sept ans, alors que nous étions en vacances à Bouillon. J'ai d'ailleurs une publication d'époque (je dois vérifier) sur la reconstruction d'Orval. J'y suis aussi allée en 82, avec un ex-futur... Ou un futur-ex. Bref encore.
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Deux impressions quand on réside en tant que "retraitante", même si je n'y faisais pas à proprement parler une retraite. (En réalité, sous couleur, comment dire, de commodité, puisque j'avais à faire dans la région, je voulais tenter l'expérience d'Orval).
La salle à manger fait suite à une salle de réunion (où l'on sert du café de 14 à 17 heures), trois grandes tables le long des fenêtres et sur le petit côté, juste après la salle. Deux tables au milieu. Une cheminée au bout de la salle. Les chaises -sauf pour les tables du milieu- sont disposées d'un seul côté des tables. Et sauf pour le petit-déjeuner, qui est un buffet préparé entre 6 et 9 heures, on se tient debout derrière sa chaise et on attend le benedicite. Très court. Puis on s'assoit et on mange en silence.
Quand je dis en silence, c'est vraiment en silence. Un silence un peu gourmé. Religieux. Pas un sourire sur des visages, penchés sur leurs assiettes, sauf exception. On reçoit une bière, le midi et le soir, excellente - la bière des moines, légère, ambrée, mousseuse, peu alcoolisée - une bière qui ne se vend pas. A part à midi, où l'on a un dessert, genre pudding aux fruits, crème, etc. On reçoit des pommes (j'ai ramené quatre pommes, vu que la première, j'ai à peine eu le temps de la terminer). Même les bruits de vaisselle sont atténués. Après quoi, nouveau benedicite - et parfois avec une pointe d'humour, et puis, on débarrasse, une équipe aide à la vaisselle, etc.
Donc, on y mange bien... Mais c'est fort austère. Les repas à Hurtebise m'ont laissé un souvenir plus joyeux...
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A 20 heures, vendredi et dimanche, je suis allée à complies (l'office de fin de journée). Sans livre, sans feuillet. Rien que pour écouter et penser, méditer, me "déchiffonner"...
Il faut s'imaginer l'état physique et mental dans lequel on est quand on arrive à Orval, après une journée de préparatifs et de route, après avoir transporté les bagages dans sa chambre, commencé à les défaire... Quand tout d'un coup, on est confronté au silence, aux espaces larges, vides, à l'immensité du jardin, au côté monumental de la façade de l'église, aux vols d'hirondelles, à la pluie - ce qui était moins dérangeant là qu'ici...
A la fin des complies, un moine éteint les lumières (ils sont peu nombreux, à vrai dire...) et l'on reste assis un long moment, dans l'ombre et le silence. Un gong retentit, quelque part, je ne sais où, et là, oui, vraiment là, on est seul face à soi-même. Tout d'un coup, on se sent douloureux de partout, avec une tête qui fait encore un vacarme incroyable... C'est vraiment très difficile de faire silence, je dirais même, de faire le silence en soi-même.
On, c'est "je", naturellement...
Et, aussi bizarre que cela paraisse, indépendamment de toute question religieuse ou non.