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Variations de regard
3 janvier 2022

Alec (William di Canzio, chez Farrar, Straus et Giroux, New York, 2021)

Je suis en train de le lire en anglais. 

Les droits ne sont pas encore vendus pour une traduction.  Je ne puis juger le style,  je n'ai pas assez d'expérience.  Je n'ai plus mon Robert et Collins,  mais il y a des traducteurs sur internet qui m'aident pour le détail des phrases.  Sinon,  pour le sens général,  je me débrouille bien.

L'auteur est professeur de littérature à l'université de Philadelphie.  Il ignore encore si le livre sera traduit,  mais l'espère.  Je lui ai posé la question et il m'a très obligeamment  répondu!  

Je suppose que cela dépend du succès du roman... et de la demande de la part d'un lectorat francophone.  Et de l'intérêt d'un éditeur (il faut que ce soit rentable...) pour franchir le cap d'une certaine confidentialité. 

**

Voilà donc une "continuation" du "Maurice",  de Forster,  un demi-siècle après la parution du roman fondateur.  

Cette fois,  l'auteur donne vie au personnage d'Alec,  l'audacieux garde-chasse qui a "enlevé, ravi Maurice à sa solitude, et doublement transgressé l'ordre établi, en escaladant l'échelle menant à la chambre fauve,  ("Scudder climbs the ladder").

Et en modifiant légèrement son caractère... chez Di Canzio, Alec est toujours issu de la classe laborieuse,  mais a reçu une bonne instruction de départ,  lit beaucoup et aime les reproductions des vases grecs. Il semble au clair, à l'aise avec ses désirs, Il est vu aussi par un homme qui appartient à une toute autre génération que le jeune Forster de 1914 ...

Il y a eu une véritable révolution entre les deux époques... timide dans les années 80, puis, surtout dans les années 90- 2000, et les suivantes. D'où les différences dans l'expression des sentiments (et des réalités de l'amour)....

Alec travaille d'abord chez une dame de la noblesse,  (peut-être inspirée par lady Ottoline Morrell ?  Je ne sais pas...) puis il part travailler à Penge - où il rencontre Maurice Hall.  L'histoire de la rencontre est racontée de son point de vue.  Avec l'aval du fonds Forster,  à Cambridge. On retrouve les personnages de Clive Durham,  de Simcox (le majordome)... et du révérend Borenius (l'homme qui soupçonne Alec de "forniquer"). 

"Idylle". L'avenir d'Alec et de Maurice serait un grand point d'interrogation si W. Di Canzio ne ressuscitait EM Forster (qui devient le personnage de Morgan) dans son propre rôle.  Il donne des leçons à Alec, le prend en amitié et devient un mentor,  un ami protecteur pour les deux amants. Il les emmène à Millthorpe,  chez Edward Carpenter et Georges Merrill. 

Jusqu'à ce que le 28 juin 1914 mette fin à une année heureuse. 

À travers le sulfureux personnage de Risley (secondaire dans le roman de Forster,  mais perdu dans le film de Ivory), Di Canzio fait passer une critique que fit Lytton Strachey (le frère de Dorothy Bussy, et l'ami du peintre Dora Carrington) à Forster.  L'histoire de ces deux-là n'était pas plausible,  elle ne devait durer que six semaines,  tout au plus.  Au bout d'un certain temps,  ils n'auraient plus rien eu à se dire.  Mais ceci n'était pas du tout du goût de Forster,  qui tenait à ce que son roman finît bien.

Et, malgré la déclaration de la guerre 14-18, elle dure. 

En 1914,  les deux personnages s'engagent.  Alec est dans la Somme et les Flandres (je pense que statistiquement,  il avait peu de chances de s'en sortir...) Maurice,  lui se trouve dans les Dardanelles (une catastrophe militaire, on le sait aujourd'hui) et tient un journal secret qui s'arrête lorsqu'il disparaît dans la débâcle, puis est retrouvé amnésique et pour ainsi dire aphasique.

Je ne vais pas raconter le reste... 

J'ai tout de même relevé une petite différence par rapport au roman de Forster. C'est vraiment minime.

Dans Maurice,  le héros écrit un discours à la gloire d'Homère,  des guerriers grecs et du courage face à la guerre... à l'occasion de l'obtention de son diplôme à Sunnington (son collège). // Maurice est dans la Territoriale et est pour la conscription. 

William Di Canzio situe ce discours lorsque Maurice quitte la petite école de Mr Abrahams,  donc,  avant le collège.  Je ne sais pas si c'est un point de détail ou non, mais cela m'a frappée.  Ceci pour dire que,  dans les Dardanelles,  il ne voit plus rien de glorieux dans la guerre. 

Bon. C'est aussi une romance.  Il y a des rebondissements assez romanesques (notamment en ce qui concerne Kitty Hall,  la soeur de Maurice). Et l'intrusion du "merveilleux". Disons,  de la télépathie. 

Mais il y a aussi des références sur l'art et la musique, (un concert avant guerre), comme une référence au tableau de Romaine Brooks,  La France (croisée), qui représente Ida Rubinstein en infirmière de la Croix Rouge,  devant Ypres en flammes. Romaine Brooks n'est pas nommée,  mais je l'ai reconnue.

Romaine Brooks

Je dois reprendre le chapitre sur la jeunesse d'Alec... 

Je ne sais pas si c'est très "anglais" (au sens où je l'entends, mais c'est très subjectif).  C'est le roman d'une vie - jusqu'en 1919.  Je ne retrouve pas vraiment l'atmosphère des romans anglais,  si difficile à caractériser. Faut-il nécessairement être anglais pour cela? 

... À suivre...

Illustrations :

1) le roman,  2) juste une photo de Rupert Graves en 1987. Et le tableau de Romaine Brooks. 

Le livre

 ***

Alec écrit sa lettre à Maurice.

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Commentaires
N
Et voilà, hier soir, j'ai vu "Maurice", le film de James Ivory. Un bon film, merci la Médiathèque !
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P
La lecture en est facilitée du fait que toute une partie du roman est reprise de Maurice, le premier roman, et que celui-là, je l'ai lu en français. Donc les personnages secondaires par exemple, me sont déjà familiers, ainsi que beaucoup de références de l'époque (même l'évocation d'une bataille de 1915, Loos). Sinon, c'est parfois toute la phrase, que je dois traduire (pour comprendre ce qui se dit)... si c'était en vis à vis, ce serait déjà plus facile.
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C
ouah, c'est formidable de te lancer dans la lecture du texte en langue originale !<br /> <br /> bravo !<br /> <br /> amitié .
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Variations de regard
Variations de regard

Quartz Rose ou pas, je suis toujours Pivoine... Me revoici, avec, pour fil conducteur, des souvenirs de Bruxelles, des balades en d'autres lieux. Donc, musardons ensemble, un peu au hasard, nous verrons bien où nos pas nous mènent

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